En quelques mots, pouvez-vous vous présenter ?
Poumi, c’est le surnom que m’a donné ma mère à ma naissance. Son entourage familial souhaitait lui imposer le prénom « Jean Louis », alors qu’elle aurait désiré m’appeler « Stéphane » ; en signe de rébellion, contrainte de se soumettre, elle décida de me surnommer « Poumi ».
Poumi, c’est le nom d’un ancien batteur d’un groupe de jazz dans les années 60, dont je n’ai pu trouver la trace.
Sans en avoir conscience, ma mère m’a-t-elle ainsi transmis, une forme d’insoumission qui aujourd’hui encore m’habite ?
Pourquoi écrivez-vous ?
Je pense que chaque personne porte en elle un enfant qui ne demande qu’à renaître ; écrire, c’est peut-être faire renaître en moi celui qui disait toujours « oui », mais qui n’en faisait qu’à sa tête.
C’est redonner la parole à l’enfant que j’étais, et qui se taisait pour mieux qu’on le laisse tranquille, préférant demeurer dans ses rêves.
Ecrire, c’est comme placer devant moi un miroir, non point pour me regarder vivre, mais pour percevoir au travers le tain noir des mots, la clairvoyance de l’esprit.
Enfin écrire, c’est comme offrir une nouvelle vie à l’enfant du silence, c’est créer un nouveau langage, celui qui permet d’accéder à soi-même.
Et qui est au juste Poumi aujourd’hui ?
Poumi, c’est peut-être l’inconscient qui réside en moi, comme en chacun de nous, tel un univers tout entier inaccessible ; c’est à la fois le vide et le plein, le sens et le non-sens, la vérité et le mensonge, l’amour et la haine, la paix et la violence, la joie et la tristesse, l’espoir et la désespérance, la présence et l’absence ; mais plus encore une matière, un corps, une histoire, une force, une libido, une énergie, en un mot une âme.
Côté pile, c’est un être, qui à force d’opposition, de pérégrination, d’obstination, de combat, de hasard, d’opportunité, de travail, de rencontre, de synergie, de soutien et d’amour familial, est parvenu à devenir un entrepreneur, chef d’entreprise d’une PME, notamment dans les énergies renouvelables.
Mais sans le côté face, incarné par Poumi, comment le côté pile aurait pu continuer d’exister ?
Depuis quand écrivez-vous ?
Très jeune, au tout début de ma vie professionnelle, j’ai pris la décision d’arrêter de travailler pour me consacrer à l’écriture d’un roman. Je suis allé jusqu’au bout de mon histoire sachant qu’à l’époque, j’ai dû trouver une dactylographe pour transcrire mon manuscrit, afin de tenter de le faire éditer.
Je n’ai plus trace aujourd’hui de ces écrits, mais je crois réellement qu’ils devaient être très médiocres. Cependant, je me souviens grossièrement de l’histoire ; à partir de 3 personnages principaux, à la fois très proches et très différents les uns des autres, chacun d’eux s’évertuaient à se comprendre, à échanger, à communiquer et à se lier d’amitié, sans jamais réellement y parvenir.
La fin de l’histoire s’achève par une sorte de suicide symbolique, celle de la rupture amicale.
La notion d’incommunicabilité entre les êtres m’a toujours questionnée ; comment au sein d’une même famille ou d’un même groupe d’amis, emplis de ressemblance et de sentiments communs, pouvait-il demeurer, en raison de quelques différences et juste par manque de liberté et de tolérance, une impossibilité des vrais échanges et de réelles compréhensions ?
A défaut de pouvoir y parvenir, l’écriture s’est imposée à moi, à la fois, comme un moyen d’instaurer un dialogue intérieur et également comme un procédé pour accéder aux mondes inconscients.
Pourquoi vouloir publier et pourquoi le faire sous un pseudonyme ?
C’est une vraie question à laquelle je ne suis pas sûr de pouvoir y répondre : est-ce pour exister à mes propres yeux ou bien pour exister au travers le regard des autres ?
Est-ce pour donner vie à Poumi, l’autre moi-même qui n’est jamais parvenu à réellement exister ?
Est-ce par besoin de reconnaissance ou bien pour instaurer un dialogue avec les autres ?
Ou bien encore, est-ce pour le plaisir et parfois même la joie de créer, au plus profond de moi-même, une résonnance, un écho, une lueur, une prise de conscience ?
Mais qu’importe les raisons et les explications, car l’important n’est-il pas avant tout d’agir et d’aller jusqu’au bout de tout projet, afin de donner vie et corps à tout ce qui nous échappe et qui pourtant nous appartient.